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Interview du Docteur Liliane Daligand au Figaro                               

 

Interview du Docteur Liliane Daligand au Figaro

Seul un procès rappelle la force de la loi ”

Liliane Daligand, professeur de médecine légale à l’université de Lyon-I et psychiatre, répond aux questions du Figaro sur le projet du garde des Sceaux.

LE FIGARO.Pensez-vous que la réforme annoncée hier par Dominique Perben réponde aux attentes des victimes ?                                            

Liliane DALIGAND. C’est l’évidence ! Je me félicite du projet du ministre de la Justice, qu’une partie des psychiatres préconisait depuis longtemps. Plusieurs centaines d’auteurs de crimes et délits sont toujours déclarés irresponsables chaque année. Or, il est terrible pour une victime d’être privée de son procès. Seule cette épreuve permet la reconnaissance des faits, la confrontation de l’agresseur avec les parties civiles, et, pour celles-ci, le début de la réparation psychique.

 

LE FIGARO.Ce n’est-ce pour autant l’intérêt des criminels déclarés irresponsables ?

 

Liliane DALIGAND.Contrairement à ce qu’on pourrait croire, ceux-ci souhaitent souvent un procès tout autant que les victimes. Les déclarer dignes de comparaître en justice, c’est une manière de les réintégrer dans la société.

J’ai connu d’anciens internés, auteurs d’infractions très graves, qui ont fondé une association militant pour le droit à un procès.Le philosophe Louis Althusser, qui avait tué sa femme dans une crise de démence, jugeait d’ailleurs intolérable d’échapper à la loi pénale.

Les auteurs aussi veulent savoir ce qui s’est passé, pourquoi ils sont passé à l’acte, et comment ils s’y sont pris.Quoi, pourquoi, comment : ce sont les trois questions auxquelles un procès doit permettre de répondre. Enfin, seul un procès permet de rappeler l’obéissance due à la loi.

 

LE FIGARO. Ne risque-t-on pas de confondre le prétoire et le divan du psychanalyste ?

Liliane DALIGAND.Je ne le crois pas du tout. La justice a toujours obéi à des considérations symboliques, et aujourd’hui magistrats et psychiatres sont complémentaires et travaillent souvent en harmonie.

Ce qui est vrai, en revanche, c’est que la justice, qui confrontait auparavant l’auteur des faits à l’État, prend maintenant en compte l’intérêt d’un troisième acteur : la victime.